Après une semaine d’affrontements meurtriers entre druzes et bédouins, le gouvernement syrien annonce la reprise du contrôle à Soueida.
La fin d’une semaine sanglante : Damas reprend la main

Dimanche 20 juillet, les autorités syriennes ont déclaré que les combats dans la ville de Soueida, au sud du pays, avaient officiellement cessé. Le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Noureddine Al-Baba, a annoncé sur Telegram que « Soueida a été évacuée de tous les combattants tribaux ». L’armée syrienne, appuyée par les forces de sécurité, a redéployé ses unités dans la région pour tenter de rétablir l’ordre, après une semaine de violences interethniques d’une rare intensité.

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), les combats qui ont éclaté le 13 juillet ont causé la mort d’au moins 940 personnes. Ce conflit local, opposant groupes druzes et tribus bédouines sunnites, s’est mué en affrontements généralisés dans plusieurs quartiers de Soueida. L’OSDH, basé à Londres, affirme que les violences ont été alimentées par des tensions historiques et des rivalités attisées par l’effondrement des structures administratives locales.

D’après l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), près de 87 000 personnes ont été contraintes de fuir leurs habitations. La plupart se sont réfugiées dans des zones rurales ou dans des installations précaires, exacerbant encore la crise humanitaire dans une région déjà fragilisée par plus de dix ans de guerre civile. Le gouvernement a promis un retour progressif à la normale, mais la situation reste volatile.

Le fragile retour de l’État : un redéploiement stratégique

Le pouvoir syrien avait initialement tardé à intervenir, laissant les affrontements dégénérer. Ce n’est que le 16 juillet que les premières unités de l’armée ont été redéployées à Soueida. Mais leur retrait rapide, quelques heures plus tard, après les frappes israéliennes sur Damas, avait plongé la région dans une nouvelle spirale de violence. Ce n’est qu’après l’annonce du cessez-le-feu israélo-syrien, sous médiation américaine, que Damas a pu opérer une reprise en main plus durable.

Pour le président par intérim Ahmad al-Chareh, la stabilisation de Soueida représente un test crucial de légitimité et de souveraineté. La reprise de cette région à majorité druze, longtemps marginalisée par le pouvoir central, vise à montrer que l’État syrien reste capable de maintenir l’ordre et de contrôler ses périphéries. Le ministère de l’Intérieur a affirmé que « toutes les énergies sécuritaires » seraient mobilisées pour restaurer la paix.

Malgré le redéploiement des forces, de nombreuses voix locales redoutent un retour à une répression autoritaire. Les associations locales de défense des droits humains signalent déjà plusieurs arrestations arbitraires. Dans une région où les tensions communautaires ont été exacerbées par l’absence d’institutions crédibles, la reprise en main par la force pourrait enflammer de nouvelles contestations.

La dimension régionale : Israël, États-Unis et équilibres instables

Les tensions ont franchi un seuil critique lorsque, en réponse au déploiement syrien à Soueida, Israël a bombardé plusieurs positions militaires à Damas. L’État hébreu justifie ses frappes par la volonté de protéger la minorité druze, notamment celle présente sur le Golan, qu’il considère menacée par l’implantation de milices pro-iraniennes dans la région. Cette intervention a temporairement contraint Damas à revoir sa stratégie sur le terrain.

Face à l’escalade, les États-Unis ont œuvré à l’établissement d’un cessez-le-feu entre la Syrie et Israël. Washington cherche à éviter une extension régionale du conflit, alors que la guerre à Gaza continue de polariser les équilibres moyen-orientaux. Le secrétaire d’État Marco Rubio a appelé samedi les autorités syriennes à « traduire en justice toute personne coupable d’atrocités, y compris dans leurs propres rangs ».

La crise de Soueida révèle la fragilité extrême du sud syrien, à la croisée des tensions communautaires internes, des intérêts israéliens sécuritaires et des ambitions iraniennes. Alors que la reconstruction du pays reste au point mort, et que les lignes de front demeurent instables, tout embrasement local peut désormais devenir un point d’embrasement régional. La paix à Soueida reste donc, à ce stade, bien plus déclarée que garantie.



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