Alors que Macron ne veut toujours pas d’elle comme Premier ministre, Lucie Castets continue de parler de programme de gouvernement, notamment de l’exit tax. La directrice des finances et des achats de la Ville de Paris a confié dans les colonnes de Libération qu’elle compte bel et bien rétablir cet impôt anti exil fiscal.
Toujours aspirante au poste de Premier ministre, Lucie Castets est revenue jeudi dernier sur le programme qu’elle entend mettre en place à Matignon au nom du Nouveau Front Populaire (NFP), sa coalition de gauche sortie vainqueur des législatives anticipées du 7 juillet. Dans les colonnes de Libération, elle a réaffirmé son souhait de rétablir « l’exit tax telle qu’elle existait avant d’être très affaiblie par Emmanuel Macron».
L’exit tax pour restreindre les délocalisations des Français à l’étranger
Cet impôt concerne certains contribuables qui transfèrent leur domicile fiscal hors de France. Il vise à restreindre les délocalisations à l’étranger en taxant, à hauteur de 30%, les plus-values latentes ou en report d’imposition sur les droits sociaux détenus par les Français qui quittent le territoire national. Ces valeurs ou droits sociaux représentent au moins 50 % des bénéfices sociaux d’une société et dépassent les 800 000 €.
Une mesure de gauche adoptée par Nicolas Sarkozy
Une première mouture de ce système avait été votée en septembre 1998, avant d’être supprimée six ans plus tard pour non-conformité avec les traités européens. Ceux-ci relèvent une entorse à la liberté d’établissement en Europe. Mais le dispositif a été ressuscité en 2011 par Nicolas Sarkozy, un président de droite.
À l’époque, le chef de l’Etat français voulait calmer la grogne générée par le bouclier fiscal et l’allègement du barème de l’ISF. La taxe concernait toutes les personnes détenant au moins 1% du capital d’une entreprise ou qui avaient un patrimoine immobilier supérieur à 1,3 million d’euros. Ces Français concernés devaient aussi céder leurs parts dans les huit ans suivant l’expatriation.
Avec l’ISF et l’exit tax, le NFP veut abolir les « privilèges des milliardaires »
En 2014, François Hollande (PS) a durci le mécanisme, en faisant passer la durée de cession de 8 à 15 ans. Trois ans plus tard, Emmanuel Macron va encore fait évoluer l’exit taxe en ramenant le délai à deux ans, faute de pouvoir la supprimer légalement.
En marge de leur campagne pour les législatives, les candidats du NFP avaient annoncé vouloir rétablir l’ISF et l’exit tax, dès leur arrivée au pouvoir. Manuel Bompard, coordinateur national de la France insoumise (LFI) avait évoqué « l’abolition des privilèges des milliardaires ».
L’exit tax pourrait rapporter 67 millions d’euros par an
Selon l’Institut Montaigne, la réinstauration de l’exit tax dans sa première version pourrait rapporter jusqu’à 67 millions d’euros par an à l’Etat français. Certains experts parlent même de 800 millions d’euros. Ces estimations ne prennent pas en compte l’effet macroéconomique de la réaction des agents à la mise en place de cette mesure. On pense que celle-ci pourrait avoir une incidence défavorable sur l’investissement et l’innovation.
Le NFP a besoin d’une majorité absolue au Parlement
L’application de l’exit tax pourrait d’ailleurs rencontrer des obstacles. D’abord au niveau européen. En effet, son rétablissement devrait nécessairement respecter un traitement non‑discriminatoire avec les contribuables résidant en France. Il y aussi des barrières sur le plan national.
Etant de nature fiscale, cette mesure devrait être votée dans le cadre d’une loi de finances. Aussi, elle a besoin d’être adoptée par une majorité absolue au Parlement en cas de cohabitation. Une possibilité qui s’éloigne avec le soutien du RN et de la droite (LR) à la macronie. D’ailleurs, il faut au préalable que le président désigne le candidat NFP à Matignon. Et ce n’est pas gagné.